Dernière semaine d’août, les courtes vacances de la députée sont à peine finies que nous lui avons demandé de répondre à quelques questions juste avant la rentrée.
AC: Avant d’aborder la rentrée peux-tu nous dire en quelques mots comment tu as vécu la dissolution ?
Avec sidération d’abord puis très vite une immense colère devant cette décision solitaire, autoritaire et pyromane de Macron le soir même où l’extrême droite venait de recueillir près de 37% des suffrages exprimés pour les élections européennes.
Quelles leçons tires-tu de la séquence européennes/législatives ?
La séquence mérite évidemment qu’on s’y attarde plus longuement qu’au travers de cet échange. J’ai été, non pas surprise car je la partage, mais frappée par le niveau de colère contre Macron et son club. Les deux scrutins confirment son affaiblissement. Il n’y a qu’à regarder la baisse du nombre de députés entre 2017 et aujourd’hui.
Concernant les élections européennes, difficile de voir autre chose que ce que nous redoutions et annoncions, la poussée terrorisante de l’extrême droite dans notre pays.
Le premier tour des élections législatives a une fois de plus donné à voir la force montante des valeurs de rejet, de racisme, de fermeture dans l’espace politique quand le second a sonné majoritairement le refus de voir ces valeurs gouverner.
Le NFP est arrivé en tête, ce fut un immense soulagement pour beaucoup de gens. Dans ma circonscription, pendant la campagne, j’ai lu la peur sur les visages de plein de gens, conscients parce que précaires, parce que femmes, parce que noirs ou musulmans, que leur avenir personnel et notre avenir commun était en péril. Un monsieur m’a dit au cours d’un porte à porte comme pour me rassurer « Madame, on va faire face ». Cette dignité doit nous animer pour gagner et transformer.
Alternative Communiste tirait de l’analyse de la situation politique et de la montée de l’extrême droite, la nécessité de travailler à l’union dans la diversité des forces de gauche et écologiques dès les européennes. Aujourd’hui, nous avons cette union avec le NPF, comment analyses-tu le positionnement de la direction du PCF qui semble enfin dans cette pratique de rassemblement ?
On peut dans un premier temps se réjouir de voir que la nécessité de l’unité s’impose. AC, comme d’autres, a porté cette idée qui était et reste très prégnante chez les électeurs de gauche.
Mais je crois que cette union reste fragile, l’expérience Nupes n’est pas si loin et aucune des forces n’a véritablement tiré de bilan de celle-ci. Dire le besoin d’unité c’est la base, encore faut il la pratiquer et avoir une culture unitaire. Pour cela il faut sortir d’un fonctionnement encore trop centré sur le rapport de force, on ne peut pas fonctionner que par coups de force et manoeuvres entre nous. J’admets que des choses bougent en positif de ce point de vue. La qualité de l’union autour de la proposition de Lucie Castets comme 1ère ministre est à souligner. A mon sens, le fait qu’elle ne soit membre d’aucune des formations du NFP y contribue. D’’ailleurs le NFP ne peut se limiter aux forces politiques, ses résultats aux législatives sont aussi largement le fruit de responsables syndicaux, associatifs, de personnalités, d’artistes, de citoyens qui dans chaque circo se sont mobilisés.
La gauche, pour gagner, doit être aussi sociale, culturelle, citoyenne.
En ce qui concerne le PCF, il faut noter le paradoxe, nous sommes engagés dans un processus unitaire au sein du NFP alors même que le projet défendu par le parti reste tourné vers l’isolement et sur des thématiques assez éloignées de ce que porte en commun le NFP. Si nous voulons que les communistes oeuvrent pleinement à ce rassemblement alors il faut opérer un braquet sur le fond sinon ils en seront écartés et continueront d’aller vers les mêmes déceptions qu’aux élections européennes.
Qu’il y ait première ministre ou pas du NPF, quel rôle pour AC de ton point de vue dans ce contexte politique ?
Nous sommes dans une grave crise politique. Chez AC, nous avons une force, celle de ne jamais penser que nous avons les solutions clefs en main, penser le mouvement. Aussi je souhaite que nous contribuions au nécessaire travail d’élaboration politique à gauche qui, en réalité, ne s’arrête jamais. J’adore les convictions, un peu moins les certitudes, surtout quand on regarde les périls qui guettent l’humanité. Nous pouvons continuer à nous donner le rôle de passerelles en oeuvrant à l’unité des forces politiques, sociales, syndicales…. Dans les réflexions qui émergent sur les formes d’organisations, notre apport communiste, sans nostalgie, est une piste sérieuse. Penser la politique comme une forme de sociabilité, s’ancrer dans des territoires aux réalités spécifiques, s’organiser en masse, nous avons des choses intéressantes à dire sur tout cela.
Et puis je crois aussi que donner à voir qu’il y a des communistes qui pensent les différentes formes de domination, d’exploitation ou d’oppression en les articulant plutôt qu’en les hiérarchisant permet de donner de l’avenir aux idées communistes.
Tu es membre de AC, tu t’interroges comme beaucoup sur la forme politique la plus efficace dans une période ou partis centralisé ou pas, mouvement gazeux ou pas, rencontre de sérieuses limites. Penses-tu qu’il y a une forme d’organisation nouvelle à créer ?
Le sujet me préoccupe nécessairement à l’heure où nous constatons les sérieuses limites que tu évoques. Pour n’en citer que 2, je pense qu’on ne peut pas défendre un projet de démocratie poussée sans passer par un fonctionnement profondément démocratique. Autre limite, on ne peut prétendre parler au nom de la gauche politique, truster toutes les décisions qui la concerne, élections comprises, avec des partis qui comportent si peu de militants, qui représentent si peu.
Mais si la forme d’organisation m’intéresse et qu’elle constitue certainement un point de blocage actuellement, ne perdons pas de vue que c’est avant tout ce qu’on veut faire avec cette ou ces orga qui est décisif. J’aurais tendance à dire qu’il y a nécessité à se renouveler sans se renier mais j’admets que la formule peut vite passer pour un truisme !
Est-ce que les député-es peuvent aider au développement du NPF ?
La Nupes était malheureusement trop centrée sur les députés, à l’inverse le NFP les a pour le moment plutôt écarté de son processus. Et ce alors même que tout pousse à donner de la force au parlement quand le Président de la République et son gouvernent, pas si démissionnaire, font usage du pire de la Vème République. Dans la nécessaire structuration locale du NFP, les députés ont aussi leur place pour lancer ou alimenter la dynamique.
As-tu un mot à dire aux membres du réseau d’Alternative communiste?
Je serai très heureuse de les retrouver nombreux et nombreuses aux manif du 7 septembre et du 1er octobre contre le coup de force de Macron ainsi qu’à la fête de l’Humanité pour militer ensemble et avec d’autres !
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