Revenir encore et encore à la « question du communisme »

Une contribution de Roger Hillel

Dans la déclaration portant création d’Alternative communiste la question du communisme n’est spécifiée que par le terme, « l’idée du communisme ». Voilà qui n’incite guère à nous interroger sur cette question pourtant centrale. Nous en avons la confirmation avec son absence dans les contributions publiées sur notre site.

J’y vois deux raisons.

La première, c’est que nous avons toujours du mal à admettre que le communisme n’a jamais existé nulle part, pas plus qu’il n’existe dans les pays qui s’en réclament indûment aujourd’hui. Des sociétés étatistes et bureaucratiques du monde soviétique, rien, absolument rien, n’est à prendre du point de vue de la question du communisme. ( cf. tout particulièrement Lucien Sève )

La deuxième raison, c’est que, si le communisme n’a jamais existé, tout est à inventer, sachant que cela ne se fera pas ex nihilo, et que toute invention tient compte de l’existant, en particulier de l’état des forces productives. D’autre part, ces inventions ne peuvent être conçues sans proposer simultanément des chemins, certainement pas exclusifs les uns des autres, pour les construire (le « communisme c’est le mouvement réel qui abolit l’état actuel des choses. Les conditions de ce mouvement résultent des données préalables telles qu’elles existent actuellement » Marx, Engels. « Le communisme n’est pas un état de choses qu’il convient d’établir, un idéal auquel la réalité devra se conformer ». Marx)

Ces inventions doivent viser à l’abolition du triptyque  : exploitation-aliénation-domination, qui est la matrice structurelle du capitalisme. Le travail philosophique d’Emmanuel Renault, consigné dans son dernier livre, « Abolir l’exploitation », est une notable contribution pour formuler les exigences normatives qui répondent à cet objectif primordial. Il importe peu que l’auteur n’utilise pas le vocable « communisme », car ce qu’il formule s’inscrit en creux dans cette problématique. Il conceptualise les formes dans lesquelles l’exploitation s’exercent et se manifestent. Il explore les deux types d’exploitation,celle capitaliste et celle patriarcale. Il examine avec soin l’intrication des rapports sociaux inter-classiques et des relations interpersonnelles. Il produit une série de concepts qui rendent compte de ces rapports/relations, dont il précise bien qu’ils s’inscrivent dans des structures exploitatives que sont le capitalisme et le patriarcat : dépendance, injustice, oppression, subordination, infériorisation, servitude, obéissance, soumission.

Ce travail philosophique peut nous être d’une grande utilité pour apprécier si les « inventions » que nous pourrions concevoir dans une visée communiste ne risquent pas de générer des effets décrits par tout ou partie de ces concepts.

De ce point de vue, je prendrai comme exemple la question du travail. Deux conceptions s’affrontent : la sécurité emploi/formation, prônée officiellement par le PCF, et le salaire à la personne ou salaire à vie (Bernard Friot le désigne depuis peu par salaire communiste). Pour moi, il est évident qu’une partie des concepts énumérés par Emmanuel Renault se retrouve dans la première conception, ce qui n’est pas le cas, je crois, dans la deuxième. Voilà selon moi un débat que nous devrions avoir.

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